Depuis 2019, nous surveillions avec un intérêt sans cesse grandissant un spectacle dont l’atmosphère comme l’histoire nous semblaient en tout point fascinants.

D’abord joué localement dans les Hauts-de-France, il avait fait notre bonheur lors d’un live fabuleux réalisé en plein confinement alors qu’il était en fin de résidence. De très belles chansons, profondes et porteuses de sens, une voix envoûtante, des rythmes fous, une énergie communicative et un clip magnifique avaient fini de nous convaincre de la qualité de ce projet. D’autres représentations ont suivi, avec en point d’orgue, l’été dernier, un très beau succès rencontré lors du Festival Off d’Avignon. Depuis, Gabor et Les Chapeaux Rouillés a fini de déployer ses ailes et a pris son envol pour une grande tournée avec plus de 80 dates dans la France entière. Inutile de vous dire que nous n’avons pas hésité une seule seconde en apprenant qu’il arrivait enfin en région parisienne, à Epinay-sous-Sénart précisément, le 10 décembre 2024. Billets en poche, au premier rang centre-scène, nous allions enfin pouvoir vivre, nous aussi, cette expérience tant attendue !

Pour celles et ceux qui n’auraient pas encore entendu parler du spectacle, voici le synopsis :

Mi-savant fou, mi-génial inventeur, Orémus se réveille un jour dans un monde de ruines et de désolation duquel toute forme de vie semble avoir disparu… Il se lance alors dans la fabrication de ce qui allait être plus qu’un automate à ses yeux : un vrai rempart contre la solitude qu’il nomme… Gabor ! Grâce à l’aide précieuse de ce compagnon de vie, il démarre la construction d’une machine devant lui permettre de retrouver cette humanité disparue. Mort avant d’être arrivé à ses fins, Orémus confie à Gabor les plans de la machine, baptisée « Harmonie », et la mission d’en terminer la construction.

Et pour vous plonger déjà en partie dans cet univers onirique , nous vous proposons de découvrir le teaser :

A la vue de ces quelques images, vous serez sans doute déjà subjugués, comme nous l’avons été, par la beauté et la richesse des décors, par l’originalité des costumes, du maquillage… Inutile de vous dire qu’en live, tout est décuplé.

Mais revenons à notre expérience immersive de dimanche dernier. Chaque spectateur est accueilli individuellement par Miss Bobinaclic ou Miss Labougeotte qui proposent de dessiner un petit cœur sur la joue ou sur la main de chacun. Aucune obligation, bien évidemment, mais on voit déjà que le public est prêt à jouer le jeu et à se laisser emporter dans l’aventure : ces petits cœurs sont visibles partout et arborés presque avec fierté. L’accueil continue dans la salle, et c’est micros ouverts que les deux personnages continuent d’aborder les spectateurs en leur demandant s’ils savent pourquoi elles dessinent ces petits cœurs. Et de répondre avec malice : « Parce que le cœur, c’est la vie ». Tout cela dans une sorte de crescendo de plus en plus entêtant.

Miss Bobinaclic mettra fin à cet accueil en lisant la gazette, permettant ainsi d’introduire le personnage de Monsieur Phylactère qui constitue une sorte de passerelle, un intermédiaire, entre notre monde réel et celui de Gabor. C’est lui qui lance alors réellement le spectacle : une vidéo projetée sur un grand drap blanc rappelle l’histoire d’Orémus, l’accident qui a conduit à la perte de l’humanité, la « naissance de Gabor », les vaines tentatives pour mettre au point Harmonie, jusqu’à la mort du savant qui laisse à sa création la mission de réaliser sa quête : retrouver cette humanité perdue.

Le drap tombe, et à partir de cet instant, tout ne sera plus que magie, féerie et émotions. Gabor apparaît, en plein doute et pétri de solitude. Ses tentatives infructueuses, dans lesquelles il met pourtant toute son énergie, touchent le public. On passe par mille et un sentiments, tantôt à rire à cause sa maladresse ou de ses pitreries, tantôt à sentir son cœur se serrer face à sa détresse et sa douleur. Moment de poésie absolu quand il trouve enfin la solution, le bon engrenage, pour qu’Harmonie puisse enfin se mettre à fonctionner, et le public à devenir cette humanité retrouvée qui va le ravir et le fasciner, lui qui, au final, ne l’a jamais connue.

C’est ici que commence, si l’on peut dire, le second temps du spectacle, celui des multiples interactions avec le public – pardon, l’Humanité. Gabor s’extasie de la moindre chose qu’il découvre, maladroit et tellement drôle dans ses propos, mais aussi et surtout émouvant voire bouleversant de candeur. Chaque spectateur devient un ami, presque un allié. Chansons, échanges avec le public, et même mise à contribution de ce dernier (nous en savons quelque chose…) se mêlent et s’entremêlent dans une valse des sentiments qui nous emporte littéralement. Au point, finalement, de nous retrouver aussi, tel un Gabor, à nous émouvoir de tout, à chaque instant. Et comme ça fait du bien !

Ce spectacle est une véritable pépite, à tous les niveaux. La scénographie est incroyable, servie par de belles lumières et de nombreux effets spéciaux (on ne vous dévoilera pas tout ici). Les textes des chansons sont finement ciselés et l’interprétation magistrale. L’orchestration est riche, dynamique, et variée. Certes, on aurait adoré découvrir le show dans sa forme live intégral, avec les musiciens en boulons et engrenages, mais on l’avoue, leurs clones vidéo, totalement intégrés au spectacle, ont réussi à nous séduire.

Il est des spectacles dont vous ne sortez pas comme vous y êtes entrés. Ils sont au final assez rares. Gabor et Les Chapeaux Rouillés en fait partie. Il pourrait même en être l’intime illustration. Drôle et bouleversant, magique et intimiste, résolument humaniste, il saura, a coup sûr, vous aussi vous toucher. Ne passez pas à côté de l’occasion de vous laisser vous aussi emporter dans ce tourbillon émotionnel.

Un spectacle fantastique, dans tous les sens du terme.
Croyez-nous, nous n’avons pas fini d’entendre parler de Gabor !

by Franck

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